mardi 28 mai 2013

67 Frédéric Skarbek biographe de Nicolas Chopin

Les informations des Mémoires de Frédéric Skarbek (Pamiętniki Fryderyka hr. Skarbkaà propos de Nicolas Chopin


Classement : questions biographiques ; Nicolas Chopin




Ceci est une suite des pages : 
*Frédéric Skarbek consacrée à la biographie de cette personnalité polonaise du XIXème siècle (1792-1866), qui a très tôt fait partie de l'entourage de Nicolas Chopin et de sa famille (en tant qu'élève de 1802 à 1806, en tant qu'ami par la suite).
*Frédéric Skarbek : Pamiętniki à propos de son ouvrage autobiographique, écrit entre 1860 et 1866, mais publié seulement en 1878.

Frederick Niecks et le livre de Skarbek
*Frederick Niecks, Chopin as a Man and Musician, 1888, chapitre 1) signale que cet ouvrage a été utilisé comme source par Maurice Karasowski, dans la première édition polonaise de son ouvrage sur Chopin, en 1882 (le livre est d'abord paru en allemand en 1877 et 1878).
Texte original
« Karasowski relates in the first and the second German edition of his biography of Frederick Chopin that the Staroscina Laczynska made the acquaintance of the latter's father, and engaged him as tutor to her children; but in the later Polish edition he abandons this account in favour of one given by Count Frederick Skarbek in his Pamietniki (Memoirs). According to this most trustworthy of procurable witnesses [Frederic Skarbek] […], Nicholas Chopin's migration to Poland came about in this way. A Frenchman had established in Warsaw a manufactory of tobacco, which, as the taking of snuff was then becoming more and more the fashion, began to flourish in so high a degree that he felt the need of assistance. He proposed, therefore, to his countryman, Nicholas Chopin, to come to him and take in hand the book-keeping, a proposal which was readily accepted. »
Traduction
« Karasowski rapporte dans les deux éditions allemandes de sa biographie de Frédéric Chopin que la Staroscina Laczynska fit la connaissance du père de ce dernier, et l’engagea comme précepteur de ses enfants, mais dans l’édition polonaise, il laisse de côté cette assertion au profit de celle que donne le comte Frédéric Skarbek dans ses Pamietniki (Mémoires). Selon ce témoin des plus fiables […], la migration de Nicolas Chopin en Pologne eut lieu de la façon suivante. Un Français avait créé une manufacture de tabac à Varsovie, laquelle, comme la consommation de cette substance devenait de plus en plus à la mode, commença à prospérer à un degré si élevé, qu’il ressentit le besoin d’assistance. Il proposa donc à son compatriote Nicolas Chopin, de venir auprès de lui et de prendre en charge la tenue des livres, proposition qui fut rapidement acceptée. »
Ce paragraphe montre que le livre de Frédéric Skarbek a été rapidement utilisé comme une source intéressante. Je sélectionnerai donc les passages que Frédéric Skarbek a consacrés aux Chopin, et d’abord, à Nicolas Chopin.

Frédéric Skarbek et Nicolas Chopin
Une première mention se trouve dans le Chapitre 1 (« Premières années de mon enfance »), où Skarbek parle assez longuement de lui ; une seconde, très courte, dans le chapitre 2.

Chapitre 1
Les passages soulignés sont ceux que l’on trouve dans le livre de Tadeusz Zieliński, Frédéric Chopin (Cracovie, 1993 ; Fayard, 1995).
« [Page 8] W jednej z podróży swych, letnią porą do Torunia odbytej, zostawiła mnie matka u znajomej swej starościny [Page 9] Łączyńskiej, pod dozorem guwernera Francuza Chopin, który miał przejść do nas na nauczyciela.
[il consacre ici quelques lignes à la famille Łączyński, notamment à Maria Walewska...]
Mikołaj Chopin, ów guverner, pod którego dozorem bawiłem w obcym domu, został nauczycielem moim i przepędziwszy lat kilkanaście przy mnie i braciach moich, przeszedł następnie na professora języka francuzkiego w Liceum Warszawskiém, gdzie do późnéj starości nauczał i emetury się dosłużył. Nie był on ani emigrantem, ani napół wyświęconym księdzem, jak wówczas byli po większej części guwernerowie francuzcy, którzy tak nie narodowy kierunek wychowaniu młodzieży polskiej nadali. Chopin przybył do Polski jeszcze przed rewolucyą francuzką, jako pisarz czy rachmistrz przy fabryce tabacznej, przez rodaka swego w Warszawie zalożonej. Nie był on przejęty ani zasadami przesadzonej wolności republikańskiej, ani udaną bigoteryą emigrantów francuzkich; nie był także rojalistą bałwochwalczą czcią dla tronu i ołtarza przejętym, ale był moralnym i poczciwym człowiekiem, który poświęciwszy się wychowaniu młodzieży polskiej, nie zakładał sobie nigdy tego, aby ją przekształcać na [Page 10] Francuzów i wpajać w nią zasady we Francyi górujące. Szanując Polaków i wdzięczny będąc ziemi i ludziom, między któremi gościnne znalazł przyjęcie i odpowiedni sposób utrzymania życia; wyplacał się im szczerze z obowiązku wdzięczności, sumienném kształceniem ich potomków na użytecznych obywateli. Przez długoletni pobyt swój w kraju naszym, przez stosunki przyjacielskie z domami polskiemi, a głównie przez ożenienie się z Polką, a z tąd przez związki małżeńskie i rodzicielskie stał się rzeczywiście Polakiem i w starości swej, doczekał się tej pociechy, że był powszechnie poważanym, jako zasłużony nauczyciel szkół publicznych; że był kochanym od uczniów swoich i ich rodziców i że naostatek miał syna, który głośno i wszędzie mieniąc się być Polakiem, zjednał ojczyżnie swojej tę chwałę, iż była kolebką jednego z największych gieniuszów muzycznych.
Pod tym czcigodnym nauczycielem, który dozgonnie był jajlepszym moim i całej rodziny mojéj przyjacielem, otrzymałem najpierwsze moje naukowe usposobienie, które w chwili gdym do szkół przechodził, zasadzało się więcej na ogólném rozwinięciu władz umysłowych, niż na szczegółowém wyuczeniu przedmiotów naukowych. »
Traduction
Les passages soulignés correspondent à la traduction proposée dans l'édition française du livre de Zieliński, traduction que j’ai rectifiée sur certains points ; les passages entre parenthèses sont des ajouts ; les passages entre crochets indiquent que la traduction est à vérifier.
« (Page 8) Durant un de ses voyages, effectué un été jusqu’à Torun, ma mère me plaça chez son amie la staroscina (Page 9) Łączyńska, sous la garde du précepteur, le Français Chopin, qui dut (ensuite) venir chez nous pour enseigner. […]
Nicolas Chopin, ce précepteur sous la garde duquel je m’étais [amusé] dans une maison étrangère (chez les Łączyński), devint mon maître et, après avoir passé quelques années auprès de moi et de mes frères, passa ensuite au professorat de langue française au Lycée de Varsovie, où il enseigna jusqu’à un âge avancé et servit jusqu’à la [retraite]. Il n’était ni un émigré ni un pédant, comme l’étaient à l’époque la plupart des précepteurs français, qui imposèrent une orientation si peu nationale à l’éducation de la jeunesse polonaise. Chopin était venu en Pologne dès avant la révolution française, comme secrétaire et comptable à la manufacture de tabac, fondée par un sien compatriote à Varsovie. Il n’était imprégné ni des principes d’une liberté républicaine excessive, ni de la bigoterie simulée des émigrés français, ce n’était pas non plus un royaliste pénétré de vénération idolâtre pour le trône et l’autel, mais un homme moral et honnête, qui s’étant voué tout entier à l’éducation des jeunes Polonais, ne chercha jamais à les transformer en (Page 10)  Français ni à leur inculquer les principes en vigueur en France. Estimant les Polonais et étant reconnaissant à un pays et à des gens, chez qui il avait trouvé un accueil hospitalier et un moyen convenable de gagner sa vie, il s’acquitta envers eux sincèrement de son devoir de reconnaissance, par la scrupuleuse éducation de leurs héritiers en tant que citoyens utiles. Par son long séjour dans notre pays, par ses relations d’amitié avec des familles polonaises et surtout par son mariage avec une Polonaise –donc par des liens conjugaux et paternels il devint réellement un Polonais et dans son âge avancé connut la joie d’être unanimement respecté en tant que professeur émérite des écoles publiques ; d’être aimé de ses élèves et de leurs parents et [pour finir] d’avoir un fils, qui ouvertement et partout se présentant comme étant un Polonais, [conquit pour sa patrie la gloire d’être le berceau] d’un des plus grands génies musicaux.
De ce maître vénérable, qui fut toujours le meilleur ami pour moi et toute ma famille, j’ai reçu ma toute première tournure d’esprit scientifique, qui, à l’époque où je suis allé à l’école, consista plus [en un épanouissement général de (mes) capacités intellectuelles, qu’en une étude détaillée des sujets scientifiques]. » [fin du chapitre 1]
Problèmes de traduction
*Nie był on ani emigrantem, ani napół wyświęconym księdzem, rendu par Il n’était ni un émigré ni un pédant dans la traduction du livre de Zielinski et par Il n’était ni un émigré ni un demi-prêtre dans le livre de Marie-Paule Rambeau, ce qui paraît justifié : l'expression veut dire littéralement prêtre à demi consacré.
Analyse
1) Nicolas Chopin est dès le départ présenté comme « Français » : « zostawiła mnie matka […] pod dozorem guwernera Francuza Chopin » , c’est-à-dire « ma mère me plaça sous la garde du précepteur, le Français Chopin » ; il n’évoque aucune origine polonaise hypothétique.
2) Il énonce l’idée que Nicolas Chopin était devenu Polonais, sociologiquement ; et il affirme que Frédéric Chopin se voulait Polonais (bien entendu, il ne s’agit que du point de vue de Frédéric Skarbek).
3) En ce qui concerne la biographie de Nicolas Chopin, il énonce des faits importants :
a) qu’il est venu en Pologne « avant la Révolution française » sans préciser la date ;
b) il évoque les circonstances de façon un peu elliptique : il s’agissait d’un emploi (secrétaire et comptable) à la manufacture de tabac de Varsovie ;
c) il donne quelques indications sur ses conceptions politiques : Nicolas Chopin était un modéré, un libéral (comme Frédéric Skarbek), sans plus de détails.
Commentaire
Ce passage présente trois aspects :
* le point de vue de Frédéric Skarbek sur Nicolas Chopin, sur ce qu’il était, selon lui ;
* les éléments que Skarbek a pu connaître personnellement (le fait que Nicolas était employé par les Łączyński juste avant d’être recruté par Louise Skarbek, le fait qu’il est devenu professeur au lycée)
* les éléments que Skarbek a pu apprendre de Nicolas Chopin : l’époque de son arrivée, son emploi à la manufacture de tabac (cet emploi est antérieur à 1794 au plus tard).
Ce texte donnait donc, en 1878, une chronologie sommaire (incomplète) de la carrière de Nicolas Chopin en Pologne : arrivée avant la Révolution ; emploi à la manufacture de tabac ; emploi chez les Łączyński; emploi chez les Skarbek ; emploi au lycée de Varsovie.

La manufacture de tabacs de Varsovie
Il s’agit probablement de la première mention d'une relation entre cet établissement et Nicolas Chopin, puisqu’elle est reprise comme une nouveauté par Karasowski ; on la retrouve dans plusieurs biographies, sans que son origine soit indiquée. Skarbek indique que la manufacture a été zalożena (fondée) par un Français, mais n’établit pas de relation expresse entre ce fait et la venue de Nicolas (c’est, à première vue, un hasard, qu’il signale pour l’anecdote). Le sens de zalożena est a priori « fondée », mais certains auteurs ou traducteurs l’interprétent comme signifiant « dirigée ».
Ce point (la manufacture de tabac) est développé dans une page spécifique.


Chapitre 2 
Ce chapitre est intitulé « Mes années d’école » et est consacré à son passage au Lycée de Varsovie (1805-1808) ; il évoque notamment l'épisode important de la guerre de 1806, qui touche directement la Pologne.
Texte polonais 
« Z powodu nieustannych przechodów wojsk i wynikającego ztąd niepokoju na wsi, przeniosła się matka moja z całym domem do Warszawy i odebrała mnie z pensyi od Lindego, tak iż wróciłem znowu pod przyjacielski nadzór dawnego nauczycieła mego Chopin'a i uczęszczałem tylko na nauki do Liceum. » (page 17)
Traduction
« A cause des continuels mouvements de troupe de l’insécurité en résultant à la campagne, ma mère transféra son domicile à Varsovie et me retira de la pension chez Linde*, de sorte que je revins sous la garde amicale de mon professeur Chopin, n’allant au Lycée que pour les cours. »
Note
*Linde : Samuel Linde (Samuel Bogumił Linde, 1771-1847) : linguiste polonais d’origine allemande (né à Torun) ; proviseur du lycée de Varsovie des origines à 1831 (cf. notice de la Wikipédia polonaise) ; ami de la famille Skarbek, il donne à Nicolas Chopin son premier poste dans l’enseignement public.
Commentaire
La seule chose notable est que Skarbek n'évoque pas le mariage de Nicolas Chopin et Justyna Krzyzanowska, qui a eu lieu quelques mois plus tôt, en juin 1806.



Création : 28 mai 2013
Mise à jour : 29 mars 2014
Révision : 30 août 2017
Auteur : Jacques Richard
Blog : Sur Frédéric Chopin Questions historiques et biographiques
Page : 67 Frédéric Skarbek biographe de Nicolas Chopin
Lien : http://surfredericchopin.blogspot.fr/2013/05/frederic-skarbek-biographe-de-nicolas.html









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